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Chapitre 22 : L’absence de Sakura

Impatience

Muu Wakabayashi et son acolyte étaient en train de discuter, toujours dans l’ancienne demeure d’Eriol Hiiragizawa, la réincarnation de Clow Read. Il semblait excédé, et faisait les cent pas dans le salon.

– Mais qu’est-ce que tu as à marcher comme ça ? Tu vas creuser des tranchées dans le sol.

Il s’arrêta, regardant la jeune fille qui venait de lui adresser la parole d’un air qui en disait long sur état d’agacement. Visiblement, il n’avait aucune affinité avec l’humour.

– Cette chasseuse de carte… Ca fait deux mois qu’elle est partie, personne ne sait où elle est, la capture n’a pas avancé d’un iota.

– Et c’était la même chose hier, et avant-hier, et la semaine dernière, et le mois dernier. Ruminer ça tous les jours ne changera rien. Elle n’est pas là, il faut prendre son mal en patience.

– La patience ce n’est pas pour moi. Depuis le temps que j’attends de m’emparer des cartes de Clow.

– Justement. Depuis le temps que tu attends, attendre quelques jours de plus ne changera pas grand-chose. Elle finira par revenir.

– Et toi, tu pourrais m’aider au lieu de rester là à rien faire. Tu pourrais aller les capturer toi-même. Pourquoi ne le fais-tu pas ?

– Eh bien, parce que c’est toi qui m’as demandé de rester à l’écart, de ne pas me dévoiler tout de suite, et d’attendre le bon moment pour m’emparer de ses cartes.

– C’est vrai, se contenta-t-il de répondre.

Il s’arrêta pour regarder à travers la fenêtre, avant de recommencer de plus belle.

– Ca m’énerve. Ils m’énervent. Ses amis incompétents. Même pas capable de capturer une carte. Plus d’un mois que Thunder est apparu, plus d’un mois que des orages éclatent tous les deux jours, et ils ne font rien.

– Tu es dur avec eux. Chaque fois que Thunder refait surface, ils passent à l’action pour la contenir.

– Mais au final, elle revient toujours. C’est donc comme s’ils ne faisaient rien.

– Ils n’ont tout simplement pas la possibilité de la capturer.

– Mais toi, tu pourrais le faire. Tu pourrais la capturer.

– Tu veux vraiment que je réponde à nouveau à la question que tu m’as posée il y a moins de deux minutes.

– C’est vrai, grogna-t-il. Tu dois rester discrète.

Pas vraiment satisfait de l’issue de la discussion, il continua à faire des allers et retours dans la pièce.

– Bon, je vais aller voir notre invité. Ca va me détendre.

– Notre invité, c’est comme ça que tu l’appelles. Depuis le temps, tu pourrais dire que c’est notre prisonnier.

– La limite est ténue.

– Et moi, qu’est-ce que je suis ? Ta partenaire ou ton invitée ?

Sans donner de réponse, Muu Wakabayashi quitta la pièce pour se diriger en direction du sous-sol où la réincarnation de Clow Read était enfermée.

Dans la pièce qui lui servait de geôle, Eriol était toujours assis sur une chaise au centre d’un cercle magique. Même s’il était là depuis un long moment, il paraissait en bonne santé. A côté de lui, un plateau-repas, vide, était posé sur le sol.

– C’est bien, tu gardes l’appétit. Ca serait dommage que tu meures de faim. En tout cas, pas tant que toutes les cartes n’ont pas été capturées.

– Je dois dire que c’était plutôt bon. Ton amie fait plutôt bien la cuisine. Pas très bavarde, mais bonne cuisinière.

– Elle a interdiction de te parler.

– Puisqu’elle m’était très sympathique, je lui ai dit qu’elle pouvait utiliser mon ancienne chambre.

– Comme tu l’as dit, c’est ton ancienne chambre. C’est ton ancienne maison. Nous pouvons disposer de n’importe quelle pièce sans avoir ton aval.

– Elle possède de grands pouvoirs. Si elle lisait mes vieux grimoires, elle pourrait devenir encore plus puissante. Peut-être même plus que moi.

– Mais toujours moins que moi. C’est pour ça que je suis le maitre, et qu’elle n’est que ma… partenaire. Et quant à toi, le fait que tu sois dans ce sous-sol suffit à prouver que je suis bien plus puissant.

– Prends garde à toi. Quand toutes les cartes auront été capturées et transformées, le lien qui m’unit à elles sera terminé. Elles n’auront alors plus besoin de mon énergie pour survivre, et j’aurai suffisamment de puissance pour te vaincre.

– Pour ça, il faudrait que ta protégée revienne finir son travail.

– Ma protégée ? Tu veux parler de Sakura ? Elle n’est plus ma protégée depuis longtemps. Elle est mon égale. Et à nous deux, nous aurons raison de toi. A nouveau.

– Tu racontes n’importe quoi. Tu parles comme si nous nous étions déjà affrontés.

– C’est le cas. Tu maitrises tellement peu tes pouvoirs, que ton sort s’est retourné contre toi. Toi aussi tu as tout oublié.

Muu rentra à l’intérieur du cercle magique, et d’une main ferme, attrapa Eriol par le cou.

– Je pourrais serrer la main, t’empêcher de respirer, te briser la nuque. Tout ça sans utiliser de magie. Quand tes cartes seront en ma possession, je m’en donnerai à cœur joie.

– Tu peux les faire tiennes, mais elles ne seront jamais toutes en ta possession.

– C’est ce qu’on verra.

Wakabayashi relâcha son emprise, tourna les talons et sortit de la pièce où était enfermé Eriol. Il était descendu pour se détendre et ne plus penser à la capture des cartes, mais sa petite visite avait eu tout l’effet contraire. Il était encore plus énervé qu’en arrivant.

La lettre

Assis dans le salon de la maison de Sakura, Toya lisait une lettre.

Toya,

J’espère que tu me pardonneras de ne pas avoir eu le courage de te dire tout ça en face à face. Mais je sais que si je t’avais parlé, tu m’aurais dissuadé de partir.

Oui, je pars. Je retourne en France à la recherche de mes souvenirs. Ca peut paraitre insensé, mais je suis sûre que je trouverai les réponses à mes questions.

Tu avais raison, l’Azusa qui était encore dans mes bras il y a quelques heures n’était pas ma fille. Je le savais. Même si ce n’était qu’une illusion, la retrouver m’a fait beaucoup de bien. Elle m’a permis de rassembler la force nécessaire pour obtenir les réponses que je cherche. J’ai désormais l’intime conviction que tout est lié. Azusa, les cartes, mes souvenirs… et Yukito.

Je réparerai ce qui a été brisé, je ferai revenir les personnes chères à notre cœur, et tout redeviendra comme avant.

S’il te plait, ne sois pas trop dur avec Kéro. Je me suis éclipsée discrètement sans qu’il me voie. Je ne lui ai rien dit non plus, lui aussi aurait essayé de me convaincre de rester.

Ne dis pas non plus aux autres où je suis partie. Je n’ai pas envie que Tomoyo, Shaolan et les autres débarquent à Paris pour venir me chercher. Ne viens pas non plus. Si j’ai besoin de toi, je te contacterai.

Mais pour l’heure, je dois résoudre tout ça par moi-même.

Prends bien soin de papa (et de Kéro, pense à lui amener souvent à manger, c’est un vrai glouton).

Je t’aime mon grand frère

Sakura

– Arrête de relire cette lettre sans arrêt. Tu vas finir par l’user.

– Tais-toi, l’ours en peluche. Je te ferais remarquer que c’est de ta faute si Sakura est partie. Tu n’as même pas été capable de la retenir alors que tu passes tes journées ici.

– Tu ferais mieux de tenir compte de ce que ta sœur a dit. Elle m’a filouté. Elle est partie sans que je m’en aperçoive. Elle a même utilisé Mirror pour se dupliquer et faire semblant d’être encore dans sa chambre.

– Je sais tout ça, tu me l’as déjà dit. Mais c’est quand même de ta faute. Elle n’est plus là.

– Elle va revenir. Tu devrais lui faire un peu plus confiance.

– Je le sais mais…

– Ca y est, tu vas recommencer avec le complexe du grand frère. Tu es l’ainé, tu dois l’aider, et blablabla… Mais en attendant, c’est elle la plus puissante. Je ne vois pas comment tu pourrais lui venir en aide.

– En attendant, elle n’est pas là, et on a cet orage qui revient sans cesse. Je n’y connais rien aux cartes de Clow et à la magie, mais je sais que ce n’est pas naturel.

– Très perspicace, le grand frère. C’est Thunder, la carte de la foudre. On fait tout pour la contenir, mais elle finit toujours par revenir.

– Pourquoi vous ne la capturez pas ?

– Malheureusement, Sakura est la chasseuse de cartes. Il n’y a qu’elle qui puisse le faire.

– Même le gamin ne peut pas ?

– Hmm… C’est un descendant de Clow, il devrait pouvoir. Mais s’il le faisait, Sakura ne pourrait pas être considérée comme la nouvelle maitresse des cartes. En attendant qu’elle revienne, on contrôle la carte quand elle réapparait.

– Toi et le gamin ? C’est suffisant ?

– On s’en sort plutôt bien. Mais heureusement, on peut aussi compter sur Kaho Mizuki qui vient nous prêter main-forte si besoin.

– Kaho… Comment va-t-elle ?

– Eh bien… Comme toi, elle a été secouée par la découverte de son passé. Elle n’en parle pas vraiment. Mais elle n’a pas le choix, elle fait avec.

Le visage de Toya était fermé. Il avait passé tant d’années avec une femme qu’il aimait réellement, avant de se rendre compte qu’il existait quelqu’un d’autre. Il avait retrouvé les souvenirs le liant à Yukito. Ils avaient été ensemble depuis le lycée, s’étaient suivis à l’université, et c’est à ce moment qu’ils avaient réellement commencés à dépasser le stade de simples amis. Ils étaient bien plus que ça l’un pour l’autre. Ils étaient amoureux. Mais, Yukito effacé de la réalité, les sentiments de Toya s’étaient redirigés vers son premier amour, Kaho Mizuki.

Il avait préféré ne rien lui cacher, et lui expliquer pourquoi il partait. Il aurait aimé qu’elle se confie aussi, mais elle restait muette sur les souvenirs qu’elle avait pu récupérer.

Toya rangea la lettre de Sakura dans sa poche, puis, alors qu’il s’apprêtait à aller dans la cuisine pour préparer à manger, s’arrêta devant la fenêtre du salon. Il regarda au-dehors, puis porta son regard vers Kéro. Il fit l’aller-retour comme ça plusieurs fois. Dehors, Kéro, dehors, Kéro.

– Qu’est-ce qui ne va pas ? Il y a un problème ?

– Thunder ? C’est comme ça qu’elle s’appelle ?

– Oui, la carte de la foudre.

– Donc, il y a de l’orage, elle reprend du service, et toi tu es là.

– Oui. Je ne peux pas toujours être sur le pont. Le gamin est là pour s’en occuper.

– Et qu’est-ce que tu attends pour aller l’aider ?

– Que tu me prépares un bon repas, pardi ! Je ne peux pas aller me battre le ventre vide.

Regroupement

Dehors, le temps était orageux. La pluie tombait si fort qu’on aurait pu penser que Watery y était pour quelque chose. Mais, les éclairs illuminant le ciel et le tonnerre retentissant ne laissaient pas le moindre doute, c’était bien Thunder qui était de nouveau passé à l’action. Et c’est malgré ce temps que Shaolan franchissait l’entrée du parc de l’empereur pingouin en courant, se dirigeant ensuite vers un jeu d’enfant. Il rentra à l’intérieur pour s’abriter.

– Enfin, j’ai failli attendre.

– Laisse-moi rire, Kéro. D’habitude, tu arrives toujours avec 30 minutes de retard. Tu es tombé du lit ?

– Il est 14h, ça fait longtemps que je suis levé.

– Alors qu’est-ce qu’il t’arrive pour que tu sois à l’heure ?

– Toya m’a mis à la porte, il n’a pas voulu me préparer à manger.

– Il a eu raison, on a plus important à faire. On doit remettre Thunder hors d’état de nuire.

– Oui, je sais bien, c’est pour ça que je suis ici. Mais j’aurais quand même préféré venir le ventre plein.

– Mais tout ceci m’inquiète de plus en plus.

– Que je ne puisse pas manger à ma faim ?

– Mais… Tu peux arrêter de toujours tout ramener à ton estomac ? Je parle de Thunder. La première fois que nous l’avons combattue, il s’est passé presque un mois avant qu’elle ne revienne. C’était trop beau pour être vrai. La seconde fois n’était pas suffisante non plus, elle est revenue deux semaines plus tard. Puis le délai entre ses deux apparitions a été réduit une semaine. Et maintenant, ça ne fait que quatre jours depuis la dernière fois.

– Oui, je sais, mais tant qu’on ne l’aura pas capturée une bonne fois pour toutes, elle continuera à revenir.

– Mais ça, il n’y a que Sakura qui puisse le faire. On n’a vraiment aucune idée d’où elle est ?

– Je pense que Toya le sait, mais il ne veut pas le dire. Elle a dû lui dire dans cette lettre qu’il relit sans cesse.

– Il faut que tu réussisses à lui prendre.

– Ca ne va pas être facile, il la garde toujours avec lui.

– Alors on doit le convaincre de nous dire où elle est. Il faut qu’il nous le dise, on doit lui faire avouer.

– Je ne suis pas sûr que Sakura apprécie que tu tortures son grand frère, répondit alors Tomoyo qui venait d’arriver à l’intérieur de jeu pour enfant.

– Tomoyo, mais que fais-tu là ? demanda Shaolan.

– Je viens filmer vos exploits pardi ! Quand Sakura reviendra, il faudra que je lui montre vos aventures.

– Comment as-tu su que nous serions là ?

– C’est très simple, vous en aviez discuté la dernière fois, et vous aviez dit que c’était ici que vous vous donniez rendez-vous.

– Il pleut depuis ce matin, pourtant tu arrives pile au bon moment. Comment as-tu fait ?

– Regarde ici, répondit-elle à Shaolan en pointant quelque chose du doigt.

– Mais c’est… une mini caméra ?

– Fortiche Tomoyo, répondit à son tour Kéro.

– Je vous ai vu arriver au moment où vous êtes entrés.

Elle sortit son téléphone portable pour consulter une notification qu’elle venait de recevoir.

– Ah, on est bientôt au complet. Kaho arrive.

– Elle t’envoie des messages, à toi, pour te dire qu’elle vient ? s’interrogea Shaolan.

– C’est vrai, il a raison, c’est nous qu’elle devrait prévenir, pesta Kéro.

– Calmez-vous les garçons, elle ne m’a pas envoyé de message, c’est juste le capteur de l’entrée du parc qui s’est déclenché à son passage.

Elle tourna son téléphone vers eux pour leur montrer une vidéo en direct du parc. On pouvait voir Kaho se diriger vers le jeu où ils se trouvaient.

– C’est légal tout ça ? demanda Shaolan.

– Oui, évidemment. Tant que personne ne le sait, c’est légal.

– Tu as un concept un peu étrange de la légalité.

Alors que Tomoyo rigolait de la remarque de Shaolan, Kaho venait de rentrer à l’intérieur du jeu pour enfant.

– Bonjour. Désolée, je suis un peu en retard. J’ai l’impression qu’on se voit de plus en plus souvent en ce moment.

– Oui, Shaolan me faisait justement remarquer que le délai d’apparition de Thunder était de plus en plus rapproché.

– Il va falloir qu’on s’arrange pour régler ça de manière définitive, continua le jeune homme.

– Plus simple à dire qu’à faire, ça fait bientôt deux mois qu’on essaie, mais qu’on ne fait que la repousser sans réellement en venir à bout.

Tomoyo tenait son téléphone entre ses mains, orienté vers ses trois amis qui étaient en train de discuter. Telle une journaliste, elle commença à leur poser des questions.

– Pouvez-vous me dire ce qui vous bloque tant dans la capture de ses cartes ?

Kéro, qui ne ratait jamais une occasion pour se mettre en avant, joua le jeu de l’interview.

– Et bien vois-tu, la puissance de Clow est basée sur deux types de magies. La magie traditionnelle occidentale, qui tire sa force à travers quatre éléments : le feu, la terre, l’eau et le vent. Mon pouvoir à moi vient du soleil, et à ce titre je maitrise le feu et la terre. Alors que Kaho, dont le pouvoir vient de la lune, maitrise l’eau et le vent.

– Tu me surestimes Kéro, je suis loin d’être aussi puissante que vous. J’ai des facilités avec ces éléments, mais ça ne va pas plus loin.

– Tu nous as quand même sortit plusieurs fois de la panade.

– Je me souviens de votre combat sur le bateau, répondit Tomoyo. Il n’y avait malheureusement pas de caméra à ce moment, mais notre reporter spécial Kérobéro nous a relaté tes exploits.

– Et il y a la magie orientale, continua Shaolan. Elle puise sa force non pas à travers quatre éléments, mais cinq : la terre, le bois, le feu, l’eau et le métal.

– La terre, le feu, l’eau, c’est quand même très proche, intervient Tomoyo. Mais où est la foudre là-dedans ?

– Bien vu, jeune fille. C’est justement là le problème. Ces éléments forment un équilibre entre eux. Les uns prenant l’avantage sur les autres à l’image d’un cycle. Mais la foudre ne rentre pas dans ce schéma. Aucun de ces éléments ne peut la combattre. Même sous ma forme originelle, je suis impuissant.

– Et toi Shaolan, tu ne peux rien faire non plus ?

– Ma magie est plus versatile. Avec mes talismans, je peux invoquer plusieurs éléments. Je peux même créer des sorts de foudre. Mais c’est le même problème, aucun élément ne peut combattre la foudre.

– Dans Naruto, le futon prend le pas sur le raiton. N’avez-vous pas encore essayé cette piste ?

Kéro, Shaolan et Kaho se regardèrent, se demandant de quoi pouvait bien vouloir parler Tomoyo.

– De quoi parles-tu, Tomoyo ? demanda Kaho.

– Et bien, voyez-vous, vos histoires de magies occidentale et orientale, j’ai l’impression que ça fonctionne comme dans Naruto. Un cycle de magies qui s’annulent mutuellement. Dans Naruto, il y a cinq éléments majeurs. La foudre est supérieure à la terre, qui gagne contre l’eau, qui à son tour est plus forte que le feu. Ensuite, on a le vent qui perd face au feu, mais en revanche, le vent remporte la victoire face à la foudre.

– Effectivement, ça ressemble au godai japonais, répondit Kaho.

– Alors, pourquoi ne pas l’essayer ? J’adorerai filmer votre victoire.

– Malheureusement, on l’a déjà essayé, sans forcément avoir ça en tête. On a déjà combattu Thunder avec le vent. Et même si c’était plutôt efficace, elle a tout de même fini par revenir.

– Et bien, ne perdez pas espoir. Aujourd’hui je suis là, je suis sûre que je vais vous porter chance !

– De toute manière, on n’a pas vraiment le choix, répondit Kéro un peu fataliste.

– Alors qu’attendez-vous pour…

Tomoyo finit sa phrase sans que personne ne l’entende. Le tonnerre gronda, donnant l’impression que la foudre venait de tomber juste à côté d’eux. Thunder étant à l’origine de tout ça, ce n’était probablement pas qu’une impression.

Le combat commence

Les quatre acolytes sortirent du jeu pour enfant afin de regarder ce qu’il s’était passé. Le spectacle était édifiant. Le ciel avait été assombri par des nuages de plus en plus menaçants, il pleuvait à verse, l’orage battait son plein. Le tout était rythmé par des éclairs qui venaient illuminer le ciel à une fréquence imprévisible mais soutenue. L’intensité du tonnerre et le faible décalage entre le bruit et la lumière montraient qu’ils étaient très proches. Cette vision apocalyptique fit un pas de plus vers la démesure lorsque des éclairs commencèrent à tomber tout autour du parc.

– C’est tout le temps comme ça ? demanda Tomoyo.

– Non, répondit calmement Shaolan. D’habitude c’est un peu plus calme.

– Un peu ? s’exclama Kéro. Ca n’a rien à voir avec d’habitude. Même sur le bateau c’était plus calme. Et pourtant, c’était déjà une sacrée tempête.

– Je ne peux qu’approuver, continua Kaho. Je ne sais pas ce qu’on va bien pouvoir faire. Je ne sais pas en quoi je vais vous être utile.

– Alors restez derrière moi avec Kéro, je vais m’en charger et vous m’aiderez quand j’aurai besoin. Tomoyo, tu ferais mieux de rester abritée.

– Et manquer le combat ? Aucune chance.

– Tu te la joues trop gamin. Si tu penses pouvoir l’affronter seul, tu te trompes. Et je ne te laisserai pas me piquer la vedette.

Kéro reprit sa forme originelle de gros lion jaune qui lui permettait de tirer profit au maximum de ses pouvoirs.

– On attaque de front tous les deux. Kaho, restes en retrait, dès qu’on faiblit tu lui envoies une attaque de vent. Ca nous permettra de nous préparer à un second assaut. Et on alterne comme ça. Ca vous va ?

Sans prendre le temps de répondre, Shaolan était déjà en train de réciter une incantation afin de lancer une attaque. Il visait un point qui semblait être le cœur de la tempête, l’œil du cyclone, qu’ils supposaient être le point faible de Thunder. Jusqu’à maintenant, ils avaient toujours procédé ainsi. Et même si la carte finissait par revenir, cela permettait au moins de la mettre hors-jeu pendant quelques jours.

Au moment où il allait lancer son attaque, un éclair encore plus gros que tous les autres vint s’abattre sur le sol, au beau milieu du parc. Un puissant souffle les fit tous tomber à terre. Après avoir repris ses esprits, Shaolan aida Tomoyo à se relever. Heureusement, elle n’avait rien. Kaho et Kéro étaient eux aussi indemnes.

– Mais, qu’est-ce que… dit Tomoyo en pointant son doigt vers le centre du parc.

A l’endroit où l’éclair était tombé, Thunder avait vraisemblablement pris la forme d’un loup argenté. Il n’avait pas de corps matériel, mais semblait constitué de faisceaux d’électricité qui étaient constamment en activité. Un peu comme ces boules en plastique qui généraient de l’électricité depuis leur centre, lorsqu’on pose ses mains dessus.

– C’est normal ça ? demanda Tomoyo qui avait recommencé à filmer.

– Non, pas vraiment, c’est la première fois qu’on voit ça, répondit Kéro.

– C’est une opportunité en or, on a quelque chose sur quoi cibler nos attaques. Il ne faut pas se louper, cette fois c’est la bonne.

Shaolan, son épée à la main, fonça vers le loup, mais fut à nouveau renversé par un puissant souffle qui les mit à nouveau tous au sol.

Cette fois, c’est Kaho qui se releva la première. La surprise se lisait sur son visage.

– Que se passe-t-il ? demanda Kéro qui venait se remettait sur ses pattes.

Kaho fixait le centre du parc, à l’endroit où Thunder venait d’apparaitre quelques secondes plus tôt. Mais désormais, il n’était plus seul.

– Sa… Sakura…

– Quoi ? s’étonna Shaolan.

Tous se tournèrent pour regarder au centre du parc.

Sakura était là, elle faisait face à Thunder. Même à quatre pattes, le loup était plus grand qu’elle, la dépassant d’au moins une tête. Elle s’éleva dans les airs jusqu’à avoir son visage au même niveau que le sien. Le loup ouvra la gueule, de laquelle sortit un son mêlant un grognement animal et le grésillement que pouvait faire l’électricité.

– Sakura, attention ! cria Shaolan qui se précipita vers elle.

Il fut stoppé net par un mur invisible qu’elle venait de former à l’aide de Shield. Tel un dôme, il se referma sur ses amis afin de les protéger.

– Sakura, laisse-nous t’aider, cria Kéro. Thunder est très puissante.

Mais la Card Captor ne semblait pas tenir compte des conseils de ses amis. Sans aucune hésitation ni peur, elle posa sa main sur la tête du loup qui était devenu étrangement docile. Au fur et à mesure que Sakura le caressait, l’orage cessait peu à peu. Quelques minutes plus tard, le soleil était revenu.

Témoins de ces changements qu’il n’expliquait pas, Shaolan avait cessé de frapper contre la barrière invisible. De toute manière, elle était tellement solide, que Sakura n’entendait certainement pas. Avec l’aide de Kéro et Kaho, ils n’avaient réussi qu’à repousser Thunder, sans jamais vraiment venir à bout d’elle.

Et là, en à peine quelques minutes, Sakura avait réussi à l’apaiser et s’apprêtait à la capturer. Elle sortit son sceptre et le loup reprit sa forme de carte qui vint se placer dans la main de sa nouvelle maitresse. En trois minutes, tout avait été réglé.

Sa mission réussie, Sakura déploya ses ailes. Elle tourna sa tête vers ses amis restés derrière elle, puis s’envola, et disparut aussi vite qu’elle était arrivée. Une fois en dehors du champ de vision, la barrière protectrice formée par Shield s’évanouit.

– Est-ce que quelqu’un peut m’expliquer ce qu’il vient de se passer ? demanda Tomoyo.

– Et bien… commença Kaho.

– Sakura était là, elle a capturé Thunder en moins de trois minutes, continua Kéro.

– Et puis elle est partie sans même nous adresser un mot, finit Shaolan.

– Je n’ai donc pas rêvé, c’était bien Sakura. Elle est enfin revenue !

A l’évocation du retour de Sakura, les autres s’étaient tus. C’est finalement Kaho qui répondit.

– Je n’ai pas l’impression que ça soit le cas. Si elle était réellement revenue, elle ne serait pas repartie aussitôt. Elle serait restée avec nous, on aurait discuté, et elle serait encore ici.

– Et elle ne nous a même pas laissés l’aider, continua Shaolan d’un air résigné. J’avais plutôt l’impression qu’elle est juste venue nous donner un coup de main, mais qu’elle n’avait pas la moindre envie de rester.

– Faisons-lui confiance, elle va finir par revenir. En attendant, on devrait se réjouir d’avoir enfin capturé cette carte. Depuis le temps qu’on essaie !

– Kéro a raison. Faisons confiance à Sakura et célébrons notre victoire comme il se doit. Vous voulez venir chez moi ? Je vous préparerai à manger.

– Et du gâteau à la fraise ?

– Mais oui, tout ce que tu veux, mon petit Kéro.

– Ah, merci Tomoyo, tu es la meilleure. Pas comme ce goujat de Toya qui m’a mis à la porte sans même me donner à manger. Tu sais, moi si je n’ai pas mes cinq repas par jour, je risque le malaise.

– Ne t’inquiète pas, on va remédier à ça.

– Si tu veux, tu peux habiter chez moi en attendant que Sakura revienne.

– Impossible, le livre de Clow est chez elle, je dois rester à proximité en permanence.

– En permanence comme maintenant ? demanda Shaolan.

– Oui, enfin non. Là je ne suis pas avec le livre puisque je suis avec vous. Mais le reste du temps, je dois le surveiller. Sauf quand je mange, ou que je dors, mais je n’ai pas beaucoup le choix.

– Gardien de pacotille…

– Allez, arrêtez de vous disputer. Pour fêter cette nouvelle capture, je vous invite chez moi ce soir. Vous êtes tous là ? Kaho, ça te dérange si je demande aussi à Toya de venir ?

– Euh, tu sais Tomoyo, c’est assez compliqué entre nous.

– Oui, je sais, raison de plus pour vous retrouver, et d’essayer d’arrondir les angles !

– Ce n’est pas une question d’angles. Mais après tout, c’est chez toi, tu invites qui tu veux. Je serai là.

– Shaolan, Kéro, vous venez aussi ?

– OK, se contenta de répondre le premier.

– Evidemment, tant qu’il y a à manger je ne refuse jamais.

– Parfait, alors rendez-vous à 17h chez moi.

– Les soirées chez Tomoyo commencent toujours très tôt. Ca laisse le temps de se remplir la panse.

– A tout à l’heure les amis.

Le petit groupe se dispersa, repartant chacun de leur côté avant de repartir chez Tomoyo. Même s’ils n’avaient pas vraiment combattu, la pluie torrentielle les avait trempés. Le temps de rentrer, de prendre une douche et de se changer, il serait bientôt l’heure d’aller chez Tomoyo.

Surprise

Au sous-sol, Eriol n’avait pas bougé d’un pouce depuis la dernière visite que lui avait rendue Muu Wakabayashi. Accroché sur sa chaise au centre d’un cercle magique, il ne pouvait de toute manière pas aller bien loin. La sensation d’une présence vint troubler sa méditation.

– Tu m’apportes déjà à manger ? demanda-t-il à sa visiteuse.

– Je ne savais pas que Clow était si gourmand. Non, je ne vous apporte pas à manger.

– Alors si tu es là, c’est peut-être que tu as quelque chose à me dire ?

La jeune fille marqua une pause pendant une vingtaine de secondes puis se décida à répondre.

– J’ai réussi.

– Dis-m’en plus. Si c’est bien ce que je pense, c’est assez incroyable.

– J’ai capturé Thunder.

A son tour, Clow s’arrêta quelques secondes pour réfléchir à ce que son interlocutrice venait de lui dire.

– C’est bluffant. Je ne sais pas comment tu as fait, mais c’est bluffant. Sakura est censée être la seule à pouvoir capturer les cartes. Même ses amis n’ont pas réussi.

– Mon pouvoir est supérieur au sien. Et au tien.

– Au mien, vu mon état, ça ne fait aucun doute. Mais même ainsi, tu n’aurais pas dû réussir. Comment as-tu fait ?

– J’ai pris l’apparence de Sakura avec la carte Mirror, et Thunder m’a obéi comme si j’étais la vraie Card Captor.

Perplexe, Clow resta sans voix, avant de se mettre à rire.

– Ahahah, parce que tu penses vraiment que prendre l’apparence de Sakura fait de toi la chasseuse de carte ? Soit tu me prends pour un idiot, soit tu ne sais toi-même pas pourquoi tu as réussi. Les cartes ne se seraient pas laissées berner. Toujours est-il que tu as pu utiliser une carte, et ça, c’est impressionnant. Bravo en tout cas. Ton maitre va être content.

– A ce sujet, ne lui dites rien, s’il vous plait. Il ne doit pas savoir que j’ai capturé une carte. Laissez-le penser que c’est Sakura qui l’a fait.

– Tu lui caches des choses ?

– Il risquerait de s’énerver. Je n’ai pas vraiment envie qu’il s’en prenne à moi.

Eriol observait la jeune fille qui semblait soudainement paniquée.

– Tu es si puissante que tu arrives à capturer des cartes. Et pourtant tu trembles devant lui. Il doit être très fort.

– Vous n’imaginez même pas à quel point. Je dois remonter. S’il voit que je me suis absenté, il va se poser des questions.

– Attends. Depuis le temps que tu viens me voir, tu ne m’as jamais donné ton prénom.

– Vous pouvez m’appeler Noeru.

– Noeru comme Noël ? C’est original. A bientôt Noeru.

La jeune fille s’éloigna pour rejoindre l’étage. Finalement, ce n’était pas Sakura qui avait capturé Thunder, mais bien cette fille.

– Une nouvelle carte vient d’entrer en jeu, dit Eriol sans que personne ne l’entende. Mais cette fois, aussi forte sois-tu, tu ne parviendras pas à la capturer.

Soirée de victoire

Chez Tomoyo, tout le monde s’était rassemblé pour fêter la victoire contre Thunder, oubliant un instant que Sakura était absente depuis deux mois. Le fait de la revoir, même quelques minutes, les avait rassurés et ils avaient désormais la certitude qu’elle n’était pas loin. Même si en réalité ce n’était pas le cas. Mais ils ignoraient cette réalité. Toya et Kaho étaient présents tous les deux. Ils avaient pris le temps de discuter un peu ensemble, mais leur situation n’avait pas évolué, et ils avaient toujours cette gêne quand ils étaient ensemble. Toya n’avait pas parlé de Yukito, et Kaho n’avait pas parlé des souvenirs qu’elle aussi avait pu retrouver.

Pour Shaolan, c’était la première fois qu’il se rendait chez Tomoyo. Evidemment, il savait que sa mère avait beaucoup d’argent, mais il ne s’attendait pas à ce que Tomoyo ait une telle maison. L’aspect maison connectée l’avait épaté, mais c’était surtout la salle de cinéma privée qui l’avait conquis. Il se mit à rougir lorsque Tomoyo projeta les aventures de « Card Captor Sakura » sur l’écran géant.

Mais la cerise sur le gâteau, c’est quand il découvrit les fenêtres à lumière artificielle.

– Elles sont géniales tes fenêtres Tomoyo. Il fait nuit, et pourtant elles produisent une lumière identique à celle du jour. Une cure de vitamine D pour les longues nuits d’hiver.

– Ah, c’est vrai, je n’avais jamais remarqué, continua Toya. Je ne savais même pas que ça existait.

– De quoi vous parlez, les garçons ?

– Tes fenêtres. Il est plus de 20h, on est en octobre, il devrait déjà faire nuit, et pourtant tout est tellement lumineux.

– Mais je n’ai pas de fenêtre comme ça, répondit-elle en s’approchant.

Kaho, qui avait suivi la discussion, venait d’ouvrir la porte d’entrée.

– Je crois qu’il y a un problème, se contenta-t-elle de dire.

Tous sortirent dehors pour constater le problème dont elle parlait. Le soleil était couché depuis quelques heures, il n’était plus visible, pourtant, le ciel était illuminé comme en pleine journée.


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