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Chapitre 12 : Sakura et la fête d’anniversaire

La préparation de Tomoyo

Dans sa chambre, Tomoyo était en train de se préparer. En sous-vêtements, elle faisait face au miroir accroché au mur et demanda :

– Bonjour Alfred, quel temps va-t-il faire aujourd’hui ?

Son reflet dans le miroir vacilla et laissa place à un affichage de la météo du jour. Aux informations visuelles s’ajouta une voix masculine artificielle mais néanmoins très réaliste.

– Bonjour Mademoiselle Daidouji. Aujourd’hui, 24 décembre, les températures seront comprises entre -1° et 6°, le temps sera sec, aucune précipitation n’est à prévoir.

– Pas de neige non plus ?

– Pas de neige, Mademoiselle Daidouji.

– Un Noël de plus sans neige… soupira Tomoyo.

– Le dernier Noël enneigé à Tomoeda remonte à 9 ans, il est en effet très peu fréquent de voir de la neige à cette époque de l’année.

– Quelle tenue me conseilles-tu pour ce soir ?

– Si vous n’avez pas prévu de rester trop longtemps dehors, je peux vous proposer celle-ci, Mademoiselle Daidouji.

La météo affichée à l’écran s’effaça, et l’écran intelligent redevint un miroir qui renvoyait l’image de Tomoyo. Au bout de quelques secondes, des vêtements s’incrustèrent sur son reflet, qui bougeaient en même temps que les mouvements qu’elle faisait.

– Hmm, non, pas ça, dit-elle en déplaçant rapidement sa main de la droite vers la gauche.

Les vêtements s’effacèrent, et d’autres vinrent se placer sur sa silhouette. Un pull de Noël rouge avec un dessin de renne, une jupe à carreaux rouges et verts qui arrivait juste au-dessus du genou, assortit de bas blancs et des petites chaussures rouges vernies.

– J’aime bien, mais… un béret rouge avec un pompon blanc ? Je sais bien que c’est la veille de Noël, mais là ça fait un peu trop mère Noël. Je ne sais même pas pourquoi j’ai ce chapeau dans ma garde-robe… J’en ai un autre sans le pompon ?

Instantanément, il fut remplacé par un autre béret, mais cette fois sans pompon.

– Oui Mademoiselle Daidouji, c’est celui-ci.

– Parfait ! Où sont-ils rangés ?

– Normalement, ils sont dans le dressing. Vous allez les chercher, ou dois-je demander à une de vos assistantes de le faire ?

– Non, c’est bon, je vais y aller moi-même.

– Le pull est en P12, la jupe en J7 et les chaussures en C45. Les bas et le béret sont dans leurs emplacements habituels.

Tomoyo enfila un peignoir, sortit de la chambre, et partit en direction du dressing qui se trouvait au bout du couloir. C’était une pièce d’une superficie à peu près deux fois plus grande que sa chambre, dans laquelle étaient installées plusieurs penderies et des étagères remplies de vêtements. Avec les indications données par son intelligence artificielle, elle les trouva facilement. En sortant, elle les scanna pour indiquer qu’ils étaient sortis du dressing.

L’appel au secours de Sakura

A son retour dans la chambre, le miroir intelligent affichait trois appels en absence de Sakura, ainsi qu’un SMS assez explicite, contenant simplement SOS.

– Appel Sakura Kinomoto, dit-elle un peu paniquée.

Sakura ne lui envoyait pas souvent des messages de détresse, elle se dit qu’il y avait probablement une carte là-dessous. Cette fois, il fallait qu’elle soit présente pour tout filmer. Les dernières captures s’étaient faites sans elle, elle avait dû se contenter des récits de son amie. Les sonneries qui retentissaient paraissaient longues, et à chacune d’elles, Tomoyo se posait un peu plus de questions. Finalement, au bout d’une vingtaine de secondes, Sakura décrocha et apparut sur l’écran. L’image n’était pas très nette, en arrière-plan Tomoyo voyait de la fumée, et le visage de son amie était comme recouvert d’une poussière blanche, probablement des cendres.

– Sakura, que se passe-t-il ? C’est encore la carte du feu qui essaye de brûler ta maison ?

– Quoi ? Non, pas du tout, je suis en pleine préparation.

– Mais… et la fumée derrière toi ? Et pourquoi m’as-tu envoyé un SOS ?

– Et bien, figure toi que le dessert que j’ai voulu préparer pour l’anniversaire d’Azusa ce soir est un véritable échec. Tout a cramé ! Et comme si ce n’était pas suffisant, j’ai fait tomber un paquet de farine sur ma tête. Je n’aurais pas dû le ranger si haut.

– Ah ouf, ce n’est que ça. J’avais peur que ça soit plus grave.

– Cet après-midi, des amis d’Azusa viennent à la maison, je dois m’occuper d’eux, je n’aurai pas le temps de préparer un autre gâteau. Comme tu es une excellente pâtissière, je voulais savoir si tu pouvais préparer un gâteau d’anniversaire pour ce soir, s’il te plait ?

– Mais oui, pas de problème, ma petite Sakura. Je te l’avais même proposé. Tu veux que je prépare quoi ?

– Et bien… laisse parler ton imagination, je te fais confiance.

– Oh oui, tu peux me faire confiance, Sakura. De l’imagination, j’en ai à revendre. Ne t’inquiète pas, je m’en occupe.

– Merci Tomoyo, à ce soir alors.

Aujourd’hui était le sixième anniversaire d’Azusa, et le premier qu’elle allait pouvoir passer avec toute sa famille. Au moment où d’autres s’apprêtaient à fêter Noël, Sakura s’attelait à organiser la journée d’anniversaire de sa fille. L’après-midi, elle allait devoir s’occuper des nouveaux amis de sa fille, avant de passer une soirée en famille.

Tomoyo enfila d’autres vêtements, elle réservait sa tenue du soir pour l’anniversaire, et se dirigea en direction de sa cuisine. Elle était environ deux ou trois fois plus grande que celle de Sakura, et tout comme sa chambre, très connectée. Sur le plan de travail, elle glissa sa main de gauche à droite, et le revêtement bois laissa place à un écran d’accueil. La même voix que celle dans sa chambre se fit entendre.

– Que puis-je pour vous, Mademoiselle Daidouji ? Voulez-vous que j’appelle une de vos assistantes pour faire la cuisine ?

– Non merci, ça ira, je dois faire un gâteau d’Azusa, je vais m’en charger moi-même. As-tu des recettes à me proposer ? Quelque chose de coloré, pour l’anniversaire d’une petite fille de six ans.

– J’ai plusieurs recettes de gâteau licorne arc-en-ciel. Il parait que ça fait son effet chez les petites filles.

– Montre-moi les photos s’il te plait.

Plusieurs photos de gâteau s’affichèrent sur l’écran du plan de travail. Tomoyo choisit la troisième. C’était un gâteau en forme bûche de Noël, la bûche formant le corps de la licorne, composé de couches de plusieurs couleurs, recouvertes par un glaçage blanc. Des parties en pâte à sucre étaient ajoutées à l’avant et à l’arrière pour former les pattes et la tête de la licorne[1].

– Celle-ci est trop mignonne. Azusa va adorer, et ma petite Sakura aussi. Est-ce que j’ai tous les ingrédients pour le faire ?

– Oui Mademoiselle Daidouji, vous avez tous les ingrédients.

– Parfait, peux-tu afficher la recette et mettre la vidéo associée ? S’il y en a une.

La vidéo se lança en plein écran, prenant toute la surface du plan de travail connecté. Tomoyo la regarda attentivement, pendant les douze minutes qu’elle durait. A la fin, la vidéo prit la forme d’une miniature en bas à gauche de l’écran, et c’est la recette qui s’afficha.

– Bon, ça parait dans mes cordes. Merci Alfred, je te dirais si j’ai à nouveau besoin de toi.

– De rien, Mademoiselle Daidouji, n’hésitez pas, c’est toujours un plaisir.

Alfred se « déconnecta », laissant un sourire sur les lèvres de Tomoyo. L’intelligence artificielle mise au point par la Daidouji Company était vraiment très au point. Evidemment, elle ne ressentait pas de plaisir, mais les réponses qu’elle donnait essayaient de coller au mieux aux réactions humaines. Sa sortie officielle était prévue d’ici un ou deux ans, et était encore actuellement en cours de tests. Tomoyo avait naturellement décidé de participer à cette phase, d’une part pour aider à son amélioration, mais aussi parce qu’elle était friande de nouvelles technologies. Ce n’était pas une aide indispensable, mais Alfred facilitait son quotidien sur certains aspects.

Elle parcourut la cuisine pour prendre tous les ingrédients, qu’elle déposait au fur et à mesure sur le plan de travail. De son doigt, elle dessina un cercle, posa un bol à l’intérieur, y versa le sucre, et s’arrêta quand un affichage lui indiqua 200 grammes. Ensuite, elle répéta la même opération pour les autres ingrédients. Son plan de travail était un bijou de technologie. En plus de disposer d’une fonction tablette qui affichait des recettes, elle comportait différents capteurs permettant de définir des zones de pesées pour tous ses ingrédients. Ce produit n’était pas créé directement par la Daidouji Company, mais un accord avec un partenaire allait leur permettre de le commercialiser conjointement avec l’intelligence artificielle.

– C’est parti, dit-elle en retroussant ses manches.

Environ 1h30 plus tard, le gâteau était terminé. Tomoyo prit une photo du résultat avec son téléphone puis l’envoya à son amie. Après quelques minutes, Sakura lui répondit « Super ! Merci beaucoup pour ton aide » suivi de plusieurs smileys. Elle rangea ensuite le gâteau au réfrigérateur en attendant la soirée d’anniversaire.

Le monde de Tomoyo

Finalement, c’était allé plus vite que prévu. Tomoyo prit le temps de se faire à manger et déjeuna tranquillement en écoutant de la musique. Dans les plaisirs de la vie, elle plaçait la musique en seconde position, juste derrière Sakura, et juste avant la cuisine. Ce n’est pas pour rien qu’elle avait décidé de devenir professeure de musique. Elle aimait en écouter, mais surtout, elle aimait chanter.

Une fois fini de manger, elle partit dans son studio d’enregistrement personnel, situé au sous-sol de sa maison, pour s’exercer. Plusieurs fois, Sakura lui avait dit de se lancer sur les réseaux sociaux pour montrer ses talents et partager ses chansons, mais Tomoyo préférait garder ça pour elle. Elle le faisait pour le plaisir, et pas pour la reconnaissance.

Quand elle chantait dans son studio, elle était concentrée sur ce qu’elle faisait, ne pensait à rien d’autre qu’à ce qu’elle était en train de faire, pas même à Sakura. Sauf, bien évidemment, quand elle chantait des compositions parlant de sa meilleure amie. Elle n’écrivait pas beaucoup, et se contentait essentiellement de reprises, mais avait quand même écrit et composé quelques chansons, dont certaines parlant de Sakura. Ces chansons, elle les gardait pour elle, personne ne les avait jamais entendues. Un jour, où elle lui fera écouter, mais pas avant qu’elles ne soient parfaites.

Quand elle chantait, elle était dans son monde. Un monde où son seul objectif était de donner le meilleur d’elle-même, de se dépasser, d’apprendre et de progresser. Elle jouait aussi de nombreux instruments de musiques, et quand elle le pouvait, elle s’accompagnait elle-même en enregistrant chacun d’eux, et en mixant l’ensemble avec sa voix. Le piano est celui qu’elle maitrisait le plus et pratiquait depuis le plus longtemps. Par la suite, elle avait appris la guitare, la basse et la batterie, avait repris depuis peu le violon, et envisageait bientôt la harpe. Pour elle qui avait l’habitude de monter des vidéos de Sakura, assembler des pistes pour monter une chanson ne lui avait pas posé beaucoup de problèmes.

Quand elle chantait, et travaillait sur ses chansons, elle ne voyait pas le temps passer. Si bien qu’à 17h, son alarme sonna, lui signalant qu’il était l’heure d’arrêter et de se préparer pour aller chez Sakura. Elle rangea son matériel et monta à l’étage pour prendre une douche. Après cette session où elle s’était donnée à fond, elle avait besoin de se rafraîchir avant de partir.

Une trentaine de minutes plus tard, elle ressortit de la salle de bain, lavée, habillée et coiffée. Sakura qui avait désormais des cheveux longs jusqu’au bas du dos, avait souvent changé de coiffure, de taille, et s’était même essayée à quelques colorations. En revanche, Tomoyo avait toujours gardé la même coupe : de longs cheveux noirs, parfois attachés pour former une tresse, comme c’était le cas aujourd’hui.

Dans la cuisine, elle prit le gâteau d’anniversaire dans le réfrigérateur et le plaça dans une boite afin de le transporter plus facilement. A coup sûr, Azusa allait être ravie de son gâteau licorne.

Dans sa voiture, un grand paquet cadeau était à l’arrière. Quelques mois plus tôt, quand la maison de Fujitaka venait de brûler, Sakura et sa fille avaient vécu quelque temps chez elle. Pendant cette période, Azusa avait voulu essayer de jouer du piano, et Tomoyo avait commencé à lui donner quelques cours. C’est pourquoi elle avait décidé de lui en acheter un pour son anniversaire. Evidemment, pas un piano droit ou à queue, mais un simple piano numérique qu’elle pourrait poser où elle veut. Elle avait, avant son achat, validé avec Sakura que ça ne lui posait pas de problème. Mais Azusa avait passé suffisamment de temps avec Tomoyo pour comprendre que ça n’est pas un jouet qui fait du bruit, mais un instrument de musique nécessitant apprentissage et persévérance. De plus, avec la possibilité de baisser le son ou de mettre un cas, il n’y avait aucun risque qu’elle fasse trop de bruit et perturbe le calme dans la maison.

Chez Sakura

Un peu avant 17h30, elle arriva chez Sakura. Quelques enfants, des amis d’Azusa, étaient encore là, et leurs parents venaient les chercher petit à petit. Alors que sa fille semblait pleine d’énergie, Sakura était plutôt épuisée, d’avoir passé l’après-midi à s’occuper des enfants.

Dans la cuisine, Fujitaka, Toya et Kaho étaient en train de faire la cuisine pour le repas du soir. De la même manière que Sakura avait demandé de l’aide à Tomoyo pour préparer le dessert, elle avait aussi réquisitionné sa famille pour s’occuper des plats.

– Bonjour Tomoyo.

– Bonjour Monsieur Kinomoto, répondit-elle. Bonjour Toya et Kaho. Tout le monde va bien ?

– Impeccable, lui répondit Toya. C’est le gâteau que tu tiens dans cette boite ? Donne-le-moi, je vais le ranger au réfrigérateur.

Curieux, il ouvrit la boite pour regarder à l’intérieur.

– Ca ne fait pas vraiment bûche de Noël, dit-il d’un ton mesquin.

– C’est normal, c’est le gâteau d’anniversaire pour Azusa.

– Vraiment ? L’anniversaire d’Azusa ? Je pensais qu’on était venu fêter Noël.

– Arrête Toya, lui dit Kaho. Il a embêté Azusa avec ça toute l’après-midi. Il lui a fait croire qu’il ne savait pas que c’était son anniversaire aujourd’hui.

– Toya… Embêter Sakura ne te suffit pas, il faut maintenant que tu fasses pareil avec sa fille.

– C’est un spécialiste, ajouta Fujitaka. Il adorait faire ça avec Sakura quand elle était petite.

– Oui je sais, elle m’en parlait souvent quand nous nous retrouvions à l’école.

– Qui aime bien châtie bien, se contenta-t-il de répondre.

– Nous fêtons Noël demain midi chez nous. Tu seras des nôtres ? demanda Kaho à Tomoyo.

– Oui, je serai là, Sakura m’avait déjà invitée. Ma mère aussi sera présente. Elle vient aussi ce soir, mais elle aura un peu de retard. La période de Noël lui occasionne toujours beaucoup de travail.

– La pauvre, travailler si tard la veille de Noël, ce n’est pas facile.

– Ne vous en faites pas pour elle. Si elle travaille autant, c’est qu’elle le veut bien, et surtout qu’elle aime ça. Je préfère mon boulot, c’est sans comparaison. Et en plus, ça me permet de voir ma petite Sakura tous les jours.

– Pourtant, c’est pas un cadeau.

– Arrête de raconter des bêtises sur ta sœur Toya, et en parlant de cadeau, viens m’aider à sortir celui d’Azusa de la voiture.

Toya enfila son manteau et suivit Tomoyo dehors pour l’aider. Bien que n’étant qu’un piano numérique, le cadeau avait quand même une taille imposante, et n’était pas facile à porter pour une jeune fille comme elle. Heureusement que le matin même, ses assistantes l’avaient déposé dans la voiture.

– Fais attention, Toya, c’est fragile.

– Ah ? Pourtant comme ça on dirait un gros parpaing entouré de papier cadeau. Qu’est-ce que c’est ?

– Tu verras bien tout à l’heure quand elle ouvrira ses cadeaux.

Entre-temps, tous les amis d’Azusa étaient partis, et elle était dans le salon en train d’aider sa mère à ranger. Occupée à jouer avec ses amis, elle n’avait pas vu Tomoyo arriver plus tôt, et couru vers elle pour lui dire bonjour. Elle s’arrêta net quand elle vit qu’elle portait un cadeau, tout excitée à l’idée de le déballer.

– Pas tout de suite, Azusa, tu attendras ce soir.

– Mais c’est déjà le soir ?

– Pas suffisamment, tu dois attendre encore un peu.

Pendant ce temps, Sakura venait de dire au revoir au papa qui était venu récupérer son enfant. Elle s’approcha de Tomoyo, qu’elle n’avait pas encore eu le temps de saluer.

– Salut Tomoyo, désolé j’étais occupé. Merci encore pour tu-sais-quoi.

– Ah oui, le gâteau dont on ne doit pas prononcer le nom.

– Par contre ce cadeau, je ne m’imaginais pas que c’était aussi grand.

– Maman, tu sais ce que c’est mon cadeau ?

– Oui, Tomoyo a vu avec moi avant de l’acheter.

– Je peux l’ouvrir maintenant ?

– Non, attends ce soir.

– Tu vois, rigola Tomoyo, c’est exactement ce que je t’ai dit. Il faut savoir être patiente dans la vie.

Un peu déçue de ne pas pouvoir déballer ce gros cadeau dès maintenant, Azusa retourna dans le salon en grimaçant. Un grand sapin avec des décorations y était installé. C’était rare de voir des sapins de cette taille au Japon, mais la maison de Sakura étant relativement spacieuse, elle avait pris le plus grand qu’elle avait pu trouver. Azusa l’observait, se demandant si elle aurait des cadeaux à la fois pour son anniversaire et pour Noël. C’était la première fois qu’elle le fêtait au Japon, et ne savait pas trop comment ça allait se passer. Lorsqu’elle était en France, le père Noël avait l’habitude de lui déposer ses cadeaux sous le sapin la veille de Noël. Mais cette année, Sakura lui avait dit qu’il passerait chez Toya, et qu’elle n’ouvrirait ses cadeaux que le lendemain. Ce qui la dérangeait un peu. Comment le père Noël faisait-il pour savoir qu’il fallait livrer les cadeaux chez son Oncle ? Comment savait-il qu’elle avait déménagé ? Est-ce que c’était vraiment le même père Noël qui livrait à la fois les cadeaux en France et au Japon ? A maintenant six ans, Azusa se posait beaucoup de questions ! Le plus simple aurait été d’avoir les cadeaux dans sa maison, et de les ouvrir le soir même.

Alors que tout le monde était dans la cuisine en train de finaliser les préparations, Tomoyo vint s’asseoir à côté d’Azusa dans le salon.

– Tout va bien pour toi, Azusa ? C’est un beau sapin que vous avez.

– Oui, ça va bien. On a déguisé le sapin avec Maman.

– Déguisé ? Je pense que tu veux dire « décoré ». Déguisé, c’est quand quelqu’un s’habille en quelqu’un d’autre, comme avec un costume de Magical Girl par exemple. Mais mettre des boules dans un sapin, c’est le décorer.

– On a décoré le sapin avec Maman.

– C’est plutôt réussi, il est très beau.

– Est-ce que le père Noël va trouver l’adresse de tonton Toya demain ?

– Mais oui, ne t’inquiète pas, le père Noël saura où aller. Tu as été suffisamment sage cette année pour recevoir tes cadeaux ?

– Oui, très sage, et j’ai bien travaillé à l’école.

– Qu’est-ce que tu aimerais avoir comme cadeau pour ton anniversaire ou pour Noël ?

– Une trottinette, un cheval licorne, un piano, une robe de princesse, un circuit avec des petites voitures, une fusée dans l’espace, des rollers pour faire comme Maman, et qu’on habite tous ensemble dans une grande maison.

– Eh bien, ça fait beaucoup de choses. Je ne sais pas si tu auras vraiment tout ça, mais on verra bien.

– Et toi, Tomoyo, tu voudrais quoi pour Noël ?

– Hmmm, Sakura est revenue au Japon, donc j’ai déjà presque tout ce dont je pourrais rêver. Mais sinon, j’aimerais qu’il neige pour Noël, ça serait un super cadeau, ça fait tellement longtemps.

D’un peu plus loin, Sakura les observait et les écoutait en souriant. Tomoyo était vraiment très attentionnée envers Azusa, et elle le lui rendait bien. Le mois qu’elles avaient passé toutes les trois avait renforcé les liens entre sa fille et sa meilleure amie.

– C’est bientôt prêt, vous venez à table ? leur dit-elle en approchant.

– On arrive tout de suite, répondit Tomoyo.

Bon anniversaire Azusa

Azusa n’avait eu ni de cheval licorne ni de fusée, mais elle avait tout de même eu bon sur certains cadeaux.

Le piano de Tomoyo avait fait sensation. Avant même de déballer les autres cadeaux, elle avait ouvert la boite et commencé à jouer un peu. Rien de très structuré, mais Tomoyo lui avait précisée que ce cadeau venait aussi avec des cours qu’elle lui donnerait, à domicile ou chez elle.

Toya lui avait offert une trottinette, et Sakura des rollers. Elle avait maintenant l’embarras du choix pour sa rentrée en école primaire dans quelques mois. Elle irait soit en roller, soit en trottinette.

Son grand-père lui prit le petit circuit de voiture qu’elle avait tant demandé.

Sonomi, qui était arrivée au moment du dessert, juste à temps pour l’ouverture des cadeaux, lui avait acheté, en avant-première, le dernier jeu vidéo de la Daidouji Company dont la sortie était prévue en début d’année.

Mais la cerise sur le gâteau, c’était justement le gâteau préparé par Tomoyo. Azusa était vraiment épatée par les talents de pâtisserie de la meilleure amie de sa mère. Elle avait même ajouté « c’est encore mieux qu’un cheval licorne ».

Carton plein pour Tomoyo, qui avait encore gagné des points pour son rôle de seconde maman.

Mais, alors qu’il était déjà tard, Azusa refusait d’aller se coucher. Sakura l’avait pourtant mise au lit vers 23h30, mais elle s’était relevée une dizaine de minutes plus tard. Elle voulait profiter autant que possible de sa famille et des cadeaux qu’elle avait reçus. Fujitaka l’avait aidé à monter son circuit.

Alors que Toya s’apprêtait à rentrer chez lui avec Kaho, Azusa l’avait rattrapé, lui demandant de l’aider dans son nouveau jeu vidéo.

A chaque fois que quelqu’un émettait l’idée de partir, Azusa trouvait une bonne raison de le faire rester. Si bien qu’au bout d’un moment, les invités n’essayaient tout simplement plus de partir, et certains s’étaient endormis sur le canapé du salon. Sakura luttait pour rester éveiller.

– Mais quelle heure est-il ? demanda-t-elle, voyant son père et Sonomi, assis côte à côte sur le canapé, en train de dormir.

– Il est 3h30, répondit naturellement Tomoyo.

– Déjà ? Ce n’est pas possible, on n’a pas vu le temps passer. Il est temps de libérer nos invités et d’aller se coucher.

– Non, encore un peu, répondit Azusa d’un air triste, c’est mon anniversaire, je m’amuse bien.

– Mais tu reverras tout le monde demain, pour Noël.

– Mais c’est ce soir mon anniversaire, demain ça sera terminé.

– Techniquement, on est déjà demain, puisqu’il est 3h30, répondit Tomoyo pleine de sens.

– Ta mère a raison, ajouta Toya, tu devrais aller dormir. Et nous aussi, nous devrions rentrer, j’ai du mal à rester éveillé.

– Oui, on va y aller, on se reverra demain, ajouta Kaho.

Mais malgré cette bonne résolution, ni l’un ni l’autre ne se décidait à bouger.

– Il est temps de rentrer.

– Oui, approuva Kaho, toujours statique.

– Mais jouons encore un peu avec Azusa avant de partir, elle a bien le droit de profiter de son anniversaire.

– Et bien, grand frère, tu fais preuve d’une énorme détermination. Tu ne donnes pas vraiment le bon exemple à ta nièce.

– Désolé Sakura, je ne sais pas ce que j’ai, mais à chaque fois que je pense à partir, je pense aussi à rester.

– Ahah, c’est marrant, rigola Tomoyo, ça me fait penser à un épisode de Buffy contre les vampires.

– Ah oui, tu as raison, répondit Sakura, je m’en souviens. Celui où ils sont tous enfermés dans la maison de Buffy lors de sa soirée d’anniversaire.

– C’est ça. C’était Dawn, la petite sœur de Buffy qui avait souhaité que tous ses amis restent auprès d’elle, et ils se sont retrouvés bloqués sans pouvoir sortir.

Tomoyo, Sakura et Kaho se tournèrent alors vers Azusa, qui était en train de jouer avec son oncle.

– Tu crois que… commença Tomoyo.

– Non, je ne vois pas comment ça serait possible. Mais maintenant que tu le dis, c’est vrai que j’ai comme une sensation étrange depuis tout à l’heure.

– Un démon vengeur qui exauce les souhaits des enfants ?

– Mais non, une présence magique, une carte de Clow.

– Une carte de Clow ? s’étonna Kaho. Je n’ai rien ressenti.

– C’est normal, ce n’est pas une carte lunaire.

– Tu arrives à sentir ça maintenant ?

– Oui et non, je marche plus par comparaison. Par exemple je me souviens de la sensation lors de la capture de Glow, ou même de Firey. Il y avait un côté chaleureux, un peu trop concernant Firey… A contrario, Watery, Jump, Wood, elles avaient une présence plutôt froide.

– Ce sont effectivement des cartes lunaires. Mais je devrais quand même être en mesure de ressentir une carte solaire. Qu’en pense Kéro ?

– Avec tout le gâteau qu’il a mangé, ce gros cochon, il est probablement en train de faire un coma diabétique. C’est peut-être une carte trop puissante pour toi ?

– Au contraire, dans le cas d’une carte puissante, je devrais davantage ressentir sa présence. Je pense plutôt que d’une manière ou d’une autre, elle cache sa présence.

– Je vais voir Kéro, il a probablement un avis sur la question. En attendant, essayez de distraire Toya et Azusa. Si je dois capturer une carte, je préfère autant qu’ils n’assistent pas à la scène.

– Si tu dois capturer une carte Sakura, je préfère autant être là et tout filmer.

– Tomoyo… ce n’est pas trop le moment.

– OK, alors dans ce cas, mets cette broche, dit-elle en sortant quelque chose de son sac.
– Euh, merci… C’est mon cadeau de Noël en avance ? C’est pour me porter chance ?

– Non, pas du tout, répondit Tomoyo tout en attachant la broche sur le pull de Sakura. Il y a une mini caméra, ça va tout filmer et je pourrais tout revoir plus tard comme si j’étais aux premières loges.

– Tomoyo, tu es irrécupérable…

La capture d’une nouvelle carte

Sakura monta à l’étage en direction de sa chambre pour voir Kéro. En y allant, elle passa devant celle d’Azusa qui était entrouverte.

– Mais… c’est impossible, dit-elle à voix basse.

Elle s’apprêtait à fermer la porte, quand elle vit qu’Azusa était allongée dans son lit. Elle s’approcha de sa fille, pas de doute, elle dormait à point fermée. Mais si elle était là, qui était donc dans le salon en train de jouer avec Toya ?

Sans même prendre le temps d’aller voir Kéro, elle redescendit au rez-de-chaussée. Azusa était là, réveillée, pleine d’énergie, en train de jouer avec tout le monde. Ca ne faisait maintenant plus aucun doute, cette carte qu’elle sentait depuis tout à l’heure, elle avait pris l’apparence de sa fille.

Elle s’approcha doucement. Il fallait qu’elle l’attire ailleurs pour la capturer.

– Azusa, il est l’heure d’aller se coucher maintenant. Tu viens avec moi ?

– Je veux jouer encore un peu.

– Il est bientôt 4h du matin, nos invités doivent repartir, ils sont fatigués. Regarde, ton grand-père est déjà en train de dormir.

– Dans ce cas, ils peuvent dormir ici.

– Hum, c’est d’accord. Tu viens m’aider ? On va préparer la chambre d’invité.

– D’accord, répondit la fausse Azusa en se levant.

– Mais non, ce n’est pas la peine, coupa Toya, on va repartir.

– Non, se contenta de répondre sèchement celle que tout le monde prenait pour Azusa.

– Azusa, ne réponds pas comme ça à ton oncle. Mais elle a raison, vous devriez rester ici. Vient avec moi Azusa, on va tout préparer, insista Sakura en lui tendant la main.

Kaho, qui avait compris que Sakura avait quelque chose derrière la tête, rentra dans son jeu et tenta à son tour de convaincre Toya de rester. De toute manière, quelle que soit la manière dont s’y prenait la carte, il était incapable de réellement vouloir et pouvoir partir.

Sakura entraina sa fausse fille dans la chambre d’ami, et referma la porte derrière elle. Avant même de pouvoir parler, la carte de Clow s’adresse à elle, toujours sous l’apparence d’Azusa.

– J’imagine que maintenant tu vas vouloir me capturer ?

Décontenancée, Sakura ne sut quoi répondre.

– Je suis une carte, tu es la chasseuse, c’est ton travail de me capturer.

La carte ne semblait opposer aucune résistance, et Sakura ne comprenait pas vraiment pourquoi, mais elle n’allait pas laisser passer cette occasion. Elle sortit son pendentif et récita l’incantation.

– Clé du sceau sacré, je te somme d’apparaître. Moi, Sakura, chasseuse de cartes, je te l’ordonne, libère ta puissance !

Sakura s’apprêtait à dire la formule suivante, lorsqu’elle fut interrompue par la carte.

– Attends. Pendant quelques minutes, peux-tu faire comme si j’étais vraiment ta fille s’il te plait ? Ensuite, tu pourras me capturer et je retournerai avec mes amies.

– Je ne… je ne comprends pas.

– Fais comme si j’étais Azusa, prends-moi dans tes bras.

Sakura ne comprenait vraiment pas où elle voulait en venir. Etait-ce un piège ? Malgré tout, elle la prit dans ses bras. Elle savait très bien que ce n’était pas le cas, mais elle avait vraiment l’impression de serrer sa propre fille. Elle ressentait sa chaleur, elle avait la même voix, la même apparence, jusqu’à l’odeur du shampoing qui était identique, et le sentait chacun des battements de son cœur. Les cartes de Clow avaient-elles un cœur, étaient-elles vivantes, avaient-elles des émotions ? Elle n’y avait jamais pensé, et elle se retrouvait là à en serrer une dans ses bras.

Après quelques minutes, la carte se libéra de son étreinte, et alla chercher la boite dans laquelle se trouvaient les photos et journaux de Nadeshiko et son grand-père. La boite dans les mains, elle s’assit sur le canapé qui était dans la pièce, et fit signe à Sakura de venir s’asseoir à côté d’elle. Elle lui tendit la boite.

– Peux-tu me raconter une histoire sur ta maman ?

Sakura avait perdu toute la méfiance qu’elle avait au départ envers la carte. Elle s’assit à côté d’elle sur le canapé, sortit le journal intime de sa mère de la boite. Elle ne fut même pas surprise lorsque la carte posa sa tête sur ses genoux.

Elle ouvrit une page au hasard du journal et commença la lecture. Chaque récit lui permettait d’en apprendre un peu plus sur sa mère qui l’avait quitté il y a bien longtemps. Dans celui-ci, Nadeshiko parlait d’un de ses voyages en Angleterre qu’elle avait fait il y a longtemps avec ses grands-parents. Elle y avait rencontré une petite fille de son âge, toutes deux raffolaient du chocolat à la menthe. Encore une nouvelle chose qu’elle apprenait à propos de sa mère. Le reste était pour le moins confus, elle parlait d’une montre enchantée destinée à l’une des deux Alice.

A la lecture, la carte avait fini par fermer les yeux et s’était endormie. Sakura lui caressa tendrement la tête, comme si c’était sa propre fille.

– C’est l’heure, lui murmura-t-elle pour la réveiller.

– Avant de me capturer, laisse-moi prendre ma véritable apparence, dit-elle en se relevant.

La fausse Azusa scintilla et prit une forme similaire à celle que Sakura avait déjà pu observer chez les autres cartes. Toujours une petite fille, mais différente d’Azusa. Elle portait sur elle une armure avec un large bouclier. C’était la première fois que Sakura voyait une carte comme ça.

– Je suis Shield, le protège les personnes et objets qui te sont précieux. Ma mission est terminée, tu peux me capturer.

Sakura brandit son sceptre.

– Carte de Clow, reprend ta forme originelle, je te l’ordonne !

Shield s’évapora en millier de particules et vint se placer entre les mains de Sakura sous sa forme de carte.

Elle regardait la boite à chaussure qui contenait les souvenirs de sa mère, tout en repensant à ce que Shield venait de dire.

– C’est toi qui l’as protégé de l’incendie ? dit-elle à haute voix.

Joyeux Noël, Tomoyo

Azusa couchée, Shield capturée, les invités de Sakura avaient enfin pu quitter la maison.

A son retour dans le salon, Sakura avait improvisé en disant à Toya qu’il n’y avait pas de draps de rechange, et qu’elle ne pouvait finalement pas les accueillir pour la nuit.

Seule Tomoyo était encore là, en train d’enfiler son manteau avant de repartir.

– Merci pour ton aide Tomoyo.

– Tu sais bien que j’adore faire de la pâtisserie Sakura.

– Non, je ne parle pas de ça, je voulais dire merci pour ton aide, pour la carte. Sans cette histoire de Buffy, jamais je n’aurais soupçonné que Shield avait pris l’apparence d’Azusa.

– Arrête de te dévaloriser, Sakura. Tu avais senti la présence d’une carte. Je t’ai juste donné le déclic qu’il fallait. Et même Kaho n’avait rien remarqué. Tu es la Card Captor, mais tu es aussi la mère d’Azusa. Tu n’aurais pas pu deviner qu’une carte avait pris sa place.

– Tu dois avoir raison. Heureusement qu’il ne lui est rien arrivé. Je ne sais pas ce que je ferais sans elle.

– Les cartes ne sont pas méchantes, elle ne lui aurait jamais fait du mal. Et dans un sens, c’est pour ta fille que la carte de Clow voulait nous garder ici. Avant le repas, elle m’avait dit qu’elle aimerait qu’on vive tous dans une grande maison. Shield a probablement voulu exaucer son vœu. Shield protège les personnes qu’on aime.

Sakura serra son amie dans ses bras.

– Rentre bien, à demain chez Toya, ajouta-t-elle.

Tomoyo s’éloigna de la maison, et Sakura referma la porte. En se dirigeant vers sa voiture, elle remarqua que des flocons de neige tombaient du ciel. Le Noël blanc dont elle rêvait depuis si longtemps était finalement là.

– Oh, il neige…

Elle inclina sa tête vers le ciel, les flocons fondaient au contact de la chaleur de son visage souriant.

A l’intérieur de sa maison, Sakura, adossée à la porte d’entrée, tenait entre ses mains la carte de l’eau.

– Joyeux Noël, Tomoyo.


[1] La recette existe vraiment : https://www.youtube.com/watch?v=zZpemvHIrQM


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